Vous avez suivi ou entendu parler de ce reportage de Cash investigation qui s’intéresse à l’intelligence artificielle et son impact sur notre quotidien.
Isahit a été contacté par un journaliste avec une liste de questions en vue de ce reportage. Isahit y a répondu.
Dans ce contexte et selon le reportage, certaines annotatrices ayant travaillé pour isahit ont été contactées et une seule personne parmi les 4.000 avec qui nous avons travaillé a été interviewée.
L’axe journalistique ou encore les propos qui ont été diffusés ne reprennent pas nos éléments de réponse, notamment sur les aspects rémunération.
En particulier le salaire moyen gagné par nos annotateurs à Madagascar, pour 60 heures de travail par mois (ce qui représente un tiers de temps complet) est de 135€ (et donc correspondrait à 135€x3=405€ pour un temps complet). Et cela ne correspond pas du tout à la rémunération de 50€ en temps complet mentionné dans le reportage.
Nous tenons à vous rassurer sur notre modèle et notre impact social positif.
Enfin et pour préserver notre communauté, isahit a toujours refusé de traiter des contenus violents ou sexuels notamment dans le cadre de modération de données.
En toute transparence, voici les réponses que nous avions fournies en amont du reportage.
1/ Pouvez-vous nous confirmer que vous respectez votre engagement de verser 60% aux annotatrices de la rémunération que vous percevez de vos clients ?
Oui nous confirmons notre modèle de départ. La genèse d’isahit repose sur une mission sociale qui est de donner des opportunités à des femmes dans le monde entier pour combattre la fracture numérique et leur permettre de réaliser un projet professionnel : reprendre ses études, lancer un projet entrepreneurial ou trouver un travail. Et c’est pour cette raison, que les femmes ne travaillent qu’à mi temps (complément de revenu), au maximum pendant 3 ans et qu’on les pousse à se former à travers la Isahit Digital Academy qui est accessible même quand on ne travaille plus pour isahit.
2/ Pouvez-vous nous dire quelle est actuellement la rémunération horaire des annotatrices qui travaillent pour Isahit à Madagascar, au Cameroun et Bénin ?
Isahit a pour volonté de payer les freelances qui travaillent sur la plateforme de 2 à 4 fois mieux que le SMIC local ou équivalent. La façon dont nous calculons le prix horaire est la prise en considération du Fair Living Wage (qui est plus élevé que le minimum wage, équivalent SMIC) sur lequel nous rajoutons 20%. Par exemple pour le Bénin, le SMIC local est à 79€ pour un temps complet. Une femme du Bénin pour un mi-temps va gagner 237€ ce qui fait 474€ par mois (à comparer avec les 79€).
3/ Quelle était la rémunération horaire des annotatrices à Madagascar en 2021 et 2022?
La rémunération horaire en 2021 et 2022 était sur un modèle différent que celle utilisée les années suivantes. Elle est maintenant basée sur un fixe et des bonus cumulatifs selon des seuils d’heures réalisés par mois permettant d’obtenir des rémunérations plus importantes que précédemment.
4/ En 2021 et en 2022, combien facturiez-vous à vos clients une heure de travail d’une annotatrice malgache ?
Chez isahit, notre modèle de facturation ne repose pas uniquement sur le coût horaire d’une annotatrice, mais sur l’ensemble de la valeur ajoutée que nous apportons à nos clients.
Cela inclut :
Le tarif facturé à nos clients pour une heure d’annotation varie en fonction de plusieurs paramètres, notamment :
Ainsi, il n’existe pas de tarif unique et fixe par pays, mais une tarification ajustée en fonction des besoins des clients et du travail requis.
5/ Nous avons recueilli de nombreux témoignages d’annotatrices qui critiquent la rémunération que vous leur versez. Elles affirment que Isahit ne leur paie pas de nombreuses heures travaillées, car les tâches à faire prennent beaucoup plus de temps que le temps défini à l’avance par Isahit. Que répondez-vous à propos de cette sous-estimation du temps de travail ?
Isahit a pour objectif d’être équitable avec toutes les parties - client et annotatrices. Ceci est enjeu majeur d’isahit.
Lors de la signature d’un projet, nous réalisons un test pour vérifier le temps nécessaire pour réaliser une tâche (et que celui-ci soit atteignable) et nous nous mettons d’accord avec le client sur ce temps pour réaliser la tâche et donc d’un prix. Ce temps est indexé à la proposition commerciale.
Lors du projet, nos outils mesurent le temps réellement passé par chaque annotatrice pour chaque tâche. Nous obtenons ainsi des indicateurs qui montrent le temps passé de façon effective par l’annotatrice et celui qui est défini contractuellement avec le client. L’objectif est que le temps passé soit équivalent au temps payé pour au moins 80% des personnes qui vont travailler sur le projet.
Deux cas peuvent se présenter : soit la jeune femme va plus vite et c’est tant mieux pour elle car elle est payée sur le tarif prévu (supérieur au temps réellement passé), soit elle est plus lente. Et dans ce cas la, nous la formons et l’aidons à gagner en productivité, soit nous l’assignons sur un autre projet plus accessible pour elle.
Ce sujet est pris très au sérieux par isahit et est suivi de façon minutieuse. Si la majorité n’arrive pas à atteindre les objectifs définis, nous revenons vers le client pour revaloriser le temps afin d’être équitable pour l’annotatrice.
6/ Selon plusieurs témoignages que nous avons recueillis, Isahit prélève un montant fixe sur les paiements versés aux annotatrices, au titre des “charges”. Pouvez-vous nous le confirmer, préciser le montant exact prélevé et comment vous justifiez ces prélèvements ?
Isahit paye ses annotatrices de plusieurs façons (virement bancaire, paypal, Mobile money) en fonction du pays et du choix de la personne. La jeune femme a le moyen de décider ce qui sera le plus avantageux pour elle. Le montant des charges retenu correspond exclusivement au montant prélevé par le service de paiement utilisé. Isahit ne prélève aucun autre frais de gestion sur les sommes gagnées et versées à chaque annotatrice.
7/ Les annotatrices doivent payer elles-même les frais liés à leur activité pour Isahit (internet, électricité, achat de matériel informatique, etc…). Pourquoi avoir fait le choix de faire porter cette charge financière sur des annotatrices qui sont bien souvent dans une grande précarité ?
Chez isahit, notre modèle repose sur l’autonomisation et l’inclusion économique des femmes dans le monde entier. Notre objectif est d’offrir des opportunités de travail digital tout en favorisant l’émancipation et l’acquisition de compétences, pour permettre à ces femmes de développer leur indépendance financière.
Un modèle flexible et adapté aux réalités locales
Isahit n’impose pas de frais fixes aux annotatrices, mais leur permet d’accéder à des missions rémunérées en ligne en fonction de leurs disponibilités et de leurs besoins. Ce modèle leur offre une flexibilité essentielle, notamment pour celles qui combinent cette activité avec d’autres engagements (études, entrepreneuriat, famille).
Un revenu significatif et un accompagnement pour réduire ces coûts
Nous nous assurons que les revenus générés sont bien au-dessus du salaire minimum local et qu’ils permettent de couvrir les frais éventuels liés à leur activité. De plus, nous accompagnons nos annotatrices en leur donnant accès à des formations gratuites et à des conseils pour optimiser leur équipement et leurs coûts.
Un choix qui favorise l’inclusion durable et la montée en compétences
Notre ambition est d’aider ces femmes à développer des compétences numériques qui leur seront utiles sur le long terme, au-delà des missions réalisées sur isahit. L’accès à un ordinateur et à Internet est une porte d’entrée vers de nombreuses opportunités professionnelles, bien au-delà de notre plateforme.
En résumé, notre approche vise à donner aux annotatrices les moyens de se construire un avenir professionnel pérenne, en leur permettant de travailler de manière autonome et en leur offrant les outils et l’accompagnement nécessaires pour transformer cette expérience en tremplin vers d’autres opportunités.
8/ Plusieurs annotatrices d’Isahit nous ont expliqué qu’en 2022, vous aviez décidé de diviser par deux le salaire horaire des annotatrices camerounaises, de 3 euros à 1,5 euros de l’heure. Comment expliquez-vous cette décision, et estimez-vous respecter vos engagements de “plateforme socialement responsable” ?
Isahit est un modèle basé sur l’équité et l’adaptation aux réalités locales
Chez isahit, nous nous engageons à proposer une rémunération juste et compétitive, qui reste significativement au-dessus des minima locaux. Nos tarifs sont ajustés en fonction de plusieurs critères, notamment les conditions économiques du pays, les types de missions et les exigences des projets.
Un ajustement nécessaire pour garantir la pérennité du modèle
En 2022, nous avons dû revoir nos grilles tarifaires pour assurer la viabilité de notre modèle, tout en continuant à offrir des opportunités à un maximum de femmes. Cette décision n’a pas été prise à la légère et a fait l’objet d’une évaluation approfondie des impacts sur les annotatrices. Nous avons veillé à ce que leur revenu reste supérieur aux standards du marché local et leur permette de continuer à bénéficier d’une activité rémunérée. Nous nous basons pour cela sur le Fair Living Wage majoré de 20%, afin de proposer une rémunération attractive et supérieure aux minimums locaux.
Un engagement toujours intact envers notre mission sociale
Isahit reste une plateforme socialement responsable, avec une approche qui dépasse la seule rémunération horaire. Nous offrons aux annotatrices un accompagnement, des formations gratuites et un tremplin vers d’autres opportunités professionnelles. Notre objectif n’est pas seulement de proposer du travail, mais aussi de permettre à ces femmes d’acquérir des compétences numériques et de se projeter dans l’avenir.
Une adaptation continue aux retours des annotatrices
Nous restons à l’écoute des feedbacks de notre communauté et nous ajustons notre approche en fonction des réalités terrain. Nos actions sont guidées par la volonté de concilier impact social et modèle économique durable, pour que nous puissions continuer à créer des opportunités pour le plus grand nombre sur les différents pays où nous sommes présents.
9/ Nous avons constaté que dans le rapport d’audit de mesure d’impact social 2023 d’isahit, il est précisé que : “when leaving Isahit, 30% experienced a positive leaving”. Ce qui signifie que 70% des annotatrices ont eu un “départ négatif”. Comment expliquez-vous cela ?
Le rapport d’audit de mesure d’impact social réalisé par un cabinet extérieur mentionne que 30% des annotatrices ayant quitté isahit ont vécu une expérience positive. Il n’est nullement indiqué que les 70% restants ont connu une expérience “négative”.
Ce chiffre reflète la diversité des parcours et des attentes des annotatrices. Parmi ces 70% certaines annotatrices n’ont par exemple pas eu la disponibilité, les compétences ou encore le matériel nécessaire pour travailler et ainsi obtenir une expérience positive. Comme il est mentionné dans le rapport, nous mesurons d’autres indicateurs qui sont : capacité à épargner, le gain de confiance qui est très important quand on se lance dans une activité et aussi leur capacité à rentrer dans le monde du travail (certaines n’ont jamais travaillé et ne connaissent pas les codes).
Notre ambition ne se limite pas à la durée de leur activité sur isahit, mais vise un impact durable sur leur employabilité et leur autonomie financière. Nous mesurons donc notre succès aussi à travers les compétences acquises, les opportunités créées et les parcours réussis après isahit.